José Iniguez

Sur sa planète, José Iniguez vit entouré de vélos. A Mende où il tient boutique depuis 15 ans, ce chef d’entreprise de 37 ans a construit sa vie familiale et professionnelle autour de sa passion pour le vélo et pour la Lozère.

14 heures. José Iniguez rentre d’une balade à vélo pendant le temps du déjeuner avant de rouvrir son magasin à Mende, Planète 2 roues. « Travailler à 5 minutes de chez soi, emmener les enfants à l’école, laisser les clés sur la voiture… c’est une qualité de vie que je souhaite à tout le monde ! ».José est un passionné. Passionné de vélo, de son métier, de la vie. Un client demande une information ? Il conjugue la courtoisie et le conseil avisé, le sourire et le diagnostic précis quant au choix de vélo à effectuer selon ses capacités physiques, son âge, le terrain où l’on roule…

« Entre le deux-roues et moi, c’est une histoire simple. » A 37 ans, ce Mendois qui se dit « chanceux d’avoir été motivé par une passion » résume son parcours : un CAP-BEP dans la mécanique puis un bac pro à Lyon et Saint-Etienne, villes qu’il fuit une fois son diplôme en poche pour retourner « chez lui ». Après trois ans comme mécano à Marvejols, il décide avec Vanessa, sa femme, de « mettre ses idées en pratique ». Il reprend à Mende « Vall Cycle » qu’il transforme, rebaptise, développe au prix de nombreuses heures de présence. Cette année, ils fêteront leurs 15 ans d’ouverture : « Nous n’avons pas changé d’adresse ni d’état d’esprit. Seulement pris quelques rides ». Fier d’avoir créé 4 emplois, son seul stress est « de pouvoir payer tout le monde à la fin du mois ». José se félicite d’avoir toute sa vie « bénéficié de coups de pouce, d’opportunités, d’un banquier qui a cru en (lui)… ».

Investi dans le bénévolat

Reconnaissant, il rend hommage à ses employés sans qui les « à côté » seraient impossibles. Car « à côté », José Iniguez s’investit bénévolement dans plusieurs associations et s’absente en conséquence du magasin, même pendant les périodes de rush. Impliqué dans l’organisation du Trophée de France des jeunes vététistes 2013 – qui a accueilli 400 jeunes à Mende –, il fait aussi vivre pendant 5 ans le Team VTT Lozère, une équipe de cyclistes « qui porte les couleurs et les valeurs du département ».

Aux vacances, il part souvent. « C’est un rêve pour tout Vttiste de faire du vélo dans les Dolomites ou en Andalousie. Mais quel plaisir de rentrer chez soi ! » Aubrac, Margeride, Cévennes, Grands Causses… Pour lui « il n’y a pas un endroit plus beau que l’autre. J’ai beaucoup roulé et couru en Lozère. On vit de chouettes moments que ce soit pour une épreuve courte comme Mende-Le Malzieu ou un grand raid entre les Causses et les Gorges du Tarn. »

Cet amoureux de la Lozère vante à chaque occasion les sports de plein air, le bien-être et la tranquillité comme des valeurs sûres du département. « Nous n’avons pas de centres commerciaux, pas de pistes de ski prestigieuses, pas de grand complexe cinématographique. Juste l’authenticité et les grands espaces. »

En savoir plus sur José Iniguez :

http://www.planete2roues.com/

http://www.lozere-sport-nature.com/activites-sportives-en-lozere.html 

©Régis Domergue

Laurent Caplat

A 39 ans, cet ancien ingénieur des travaux publics dirige depuis plus de dix ans une épicerie fine en ligne, BienManger.com. Retour sur le fabuleux destin de Laurent Caplat, un amoureux du terroir lozérien et audacieux chef d’entreprise.

L’histoire de BienMmanger.com démarre comme une légende : deux jeunes gens d’une vingtaine d’années – Laurent Caplat et Vincent Lacas – se passionnent pour l’informatique, imaginent développer la vente pour une association de petits producteurs lozériens et… en 2000, lancent une épicerie fine en ligne ! Dans la maison de famille de Banassac (où l’arrière-grand-mère de Laurent était épicière jusque dans les années 1970), le jeune homme installe quelques étagères pour stocker les premiers produits. Contactés par des investisseurs professionnels de l’e-commerce (les fondateurs d’alapage.com), ils bénéficient d’une nouvelle visibilité. « C’était le début de la bulle, un nouvel eldorado qui suscitait un énorme enthousiasme », se souvient Laurent Caplat, gérant de Bien manger.com.

 

Aujourd’hui, l’entreprise compte 40 collaborateurs d’une moyenne d’âge de 30 ans, 4600 produits venus de France et de l’étranger – parmi lesquels 480 produits lozériens – et génère 5 millions d’euros de chiffre d’affaires. Depuis juillet 2013, Laurent Caplat gère « Lozère authentique », une boutique située sur l’aire de la Lozère le long de l’autoroute A75. Il y fait installer de grands écrans en vitrine pour valoriser d’autres sociétés lozériennes. « J’ai voulu créer un espace dédié aux savoir-faire en Lozère. » Parmi ses autres envies, celle d’ouvrir une boutique à Montpellier ou Paris, pour « apprendre à gérer un magasin en synergie avec un site internet ».

Les nouvelles technologies : une chance pour le monde rural

Cet ingénieur en travaux publics, d’abord employé au ministère de l’Environnement, ne pensait pas créer une entreprise en Lozère. Aujourd’hui, il croit plus que jamais que les nouvelles technologies sont une chance pour les départements ruraux. « Les anciennes générations étaient obligées de partir trouver un job à Paris, maintenant on peut rapatrier des métiers et le faire dans de bonnes conditions de salaire et de qualité de vie. » Et de citer tous les métiers de l’informatique et de la communication de sa société – développeur, ingénieur réseau, graphiste, web designer, chef de projet, emarketer, etc.

S’il s’intéresse à « tout ce qui peut être Lozérien », il est curieux d’autres gourmandises. La cuisine « moléculaire » en fait partie. « C’est une façon d’attiser la curiosité sur des saveurs et d’obliger à réfléchir à ce que l’on mange », explique-t-il. Contre l’uniformisation des goûts, recourir à une cuisine aussi audacieuse préfigure une certaine témérité…  Bien manger.com est le premier revendeur des produits de Ferran Adrià, chef catalan, précurseur de cette gastronomie.

Bien manger sort beaucoup ! Chaque année, 50 000 colis sortent de Lozère, à destination… du monde entier. Laurent Caplat peut s’enorgueillir de faire vivre une telle entreprise en Lozère. « Cela passe bien maintenant auprès des fournisseurs et des clients. Même si tout le monde ne sait pas encore où situer le département ! 

En savoir plus sur Laurent Caplat :

http://www.bienmanger.com/1S_Recherche.html?mc=lozere&langue=1&x=0&y=0

http://plaisirsauthentiques.com/

©Régis Domergue

Cécile Piat

En 2003, Cécile Piat quitte Paris pour « se mettre au vert » avec son mari Xavier, artisan de luxe et créateur de maroquinerie. Ils s’installent d’abord à Millau, puis à Mende où ils reprennent en 2007 une cordonnerie place Estoup. Rencontre avec une jeune femme énergique, férue de mode et de beaux accessoires.

Elle aime les rapports francs, les bonnes poignées de main, les regards dans les yeux. Dans la cordonnerie de la place Estoup qu’elle a reprise en 2007 avec Xavier, son mari, Cécile Piat raconte comment il lui a fallu faire ses preuves auprès de la clientèle. « Ce métier reste encore masculin dans l’esprit des gens, bien qu’il commence à se féminiser. » D’ailleurs, dans l’atelier, une autre femme apporte ses compétences au couple. « Sandrine Villan est une ancienne costumière de théâtre, elle s’est formée pendant un an à Romans. J’admire son côté méticuleux et raffiné. »

Pourquoi la Lozère ? « Parce que nous aimons la nature, les plantes sauvages et les champignons ! Nous en sommes tombés amoureux, la qualité de vie est indiscutable. Ici, notre fille de 9 ans va à l’école toute seule. Et nous avons noué des rapports merveilleux avec nos clients. »

Des clients qui viennent de toute la France, et même de l’étranger. Tout cela est dû au talent de Xavier, reconnaît Cécile : « Dans sa famille, il représente la quatrième génération de cordonniers ! A Paris, il avait repris l’atelier de son père, rue de Seine, à Saint-Germain-des-Prés. Il a toujours travaillé dans la cordonnerie de luxe et répare aussi bien les bottes de grands créateurs que des chaussures ordinaires. » Ici, les étagères ne désemplissent pas et les journées n’ont que vingt-quatre heures.

De l’histoire de l’art à la cordonnerie

Après des études en histoire de l’art, Cécile entre au Printemps, boulevard Haussmann, à Paris. Elle y est responsable des relations avec des créateurs de mode. Elle affine son goût des beaux accessoires et de la maroquinerie de luxe. Elle égrène les noms des plus grands de la chaussure en précisant leurs talents. Untel est un « magicien du soulier, créateur de talons compensés très confortables », l’autre un « vrai bottier pour femmes ». Au contraire des produits bon marché, ces chaussures chères se réparent. « Il faut pouvoir dire au client que le coût de la réparation excèdera le prix de la chaussure. C’est souvent difficile à entendre ! » Alors c’est simple, « Pour bien se chausser, il faut attendre les soldes et les ventes privées. »

Cécile reste humble : « Ici je suis en formation permanente ! Je bichonne les chaussures, assure le nettoyage, le cirage, la teinture… » Elle admire le geste parfait de Xavier travaillant le cuir, ce matériau noble qu’il coud à la main, selon un savoir-faire ancien et devenu bien rare aujourd’hui. Elle vante la qualité des produits qu’il utilise : « La peausserie vient du Puy-en-Velay ou du pays basque, les boucles de ceinture sont forgées à la main… » Elle regrette que tant d’artisans d’art s’expatrient au Japon où la culture est raffinée et où l’on garde le goût du travail « bien fait »« En mettant nos retraités à la porte, on scie la branche sur laquelle on est assis… C’est dommage. »

En savoir plus sur Cécile Piat :

http://atelierxavierpiat.com/portrait/

©Régis Domergue

Gonzalo Diaz

Depuis plus de trente ans qu’il marche sur le plateau de l’Aubrac, il éprouve toujours autant d’admiration pour cette région qui ne se laisse pas complètement apprivoiser. Pour Gonzalo Diaz, accompagnateur de randonnées, la Lozère n’a rien à envier aux régions les plus extrêmes de la planète.

Pionnier, Gonzalo Diaz développe les randonnées sur l’Aubrac dans les années 1980 quand le tourisme vert n’existe pas encore. « Cela semblait surréaliste de gagner sa vie en marchant. » Le territoire est agricole, Nasbinals est un village déserté comme beaucoup d’autres. Il noue des contacts avec des offices de tourisme, des

hôteliers, des prestataires de services, des responsables de gîtes, le comité départemental de tourisme… «  Le secteur n’était pas du tout concurrentiel à l’époque ! Sur le chemin de saint Jacques, il ne passait pas 2 500 randonneurs en 6 mois, mais 400 par année », se souvient-il. « C’est la montée en puissance de la randonnée et le tourisme vert qui ont fait des villages du plateau les fleurons du tourisme de la randonnée. »

Depuis, Gonzalo Diaz a encouragé la venue d’agences telles que Chamina, Chemins du Sud, Nomade Aventure… Il travaille toujours en réseau, avec le Bureau des accompagnateurs des monts d’Aubrac, «  pour mutualiser moyens et compétences et répondre à une demande plus large : raquettes, sorties brame du cert, rando généraliste… ».

« De l’Aubrac » avant tout

Pour cet Espagnol naturalisé français, la Lozère reste une terre d’accueil. Venu en 1965 à l’âge de 5 ans rejoindre ses parents qui fuyaient leur Galice natale, il garde des attaches familiales en Espagne où il organise d’autres randonnées. Plus que de Lozère, il se dit de l’Aubrac. « On a tendance dans notre métier à oublier les limites des départements. La randonnée nous emmène en Aveyron, puis dans le Cantal, mais on est sur l’Aubrac avant tout. » C’est sur le plateau qu’il commence son métier, licence d’espagnol en poche. Il rejoint Royal Aubrac, un centre de vacances où il fait ses premières armes auprès de familles. « C’était facile dans les années 80 de travailler sans diplôme, je connaissais suffisamment le plateau pour démarrer. » Il passe diplômes et qualifications diverses en 1985.

Son goût de la marche et des voyages l’emmène à l’étranger « dans des secteurs qui ont un potentiel de randonnée » car c’est une seconde nature pour lui de garder l’œil sur ce qui pourrait être développé. Il propose donc des randonnées en Irlande, aux Canaries, en Espagne dans les Asturies, en Argentine… Mais 80 % de son activité est sur l’Aubrac et sa périphérie. «  J’apprécie d’autant plus l’Aubrac et la Lozère que je connais autre chose. »

Il rêve de Finlande, de Patagonie chilienne et d’autres endroits extrêmes. Pourtant, il reconnaît que la Lozère offre un formidable terrain de pratiques professionnelles à domicile. « L’hiver avec ses paysages en noir et blanc, le moindre arbre, le moindre piquet de clôture, le moindre muret de pierres prend une intensité particulière. C’est sur le plateau, dans la tourmente, à la recherche du buron où allumer la cheminée et se mettre au chaud, que l’on réalise être dans un territoire sacrément puissant. »

En savoir plus sur Gonzalo Diaz :

http://www.lozere-tourisme.com/randonnee-en-lozere.html

©Régis Domergue

Patricia Sunyer & Laurent Mouliade

A la Borie de l’Aubrac, c’est une Catalane et un Laguiolais qui accueillent le touriste. En 2007, Patricia Sunyer, chef de réception, et Laurent Mouliade, maître d’hôtel, unissent leurs compétences personnelles et professionnelles pour transformer une ferme en une maison d’hôtes sur des terres d’estive, à 4 km de Nasbinals. Trois ans plus tard, ils ouvrent cinq chambres d’hôtes. Bienvenue chez un couple généreux et attentionné.

Leur maison d’hôtes a ouvert ses portes en 2010 et, depuis, les fidèles reviennent… Pour parvenir à vivre de leur métier avec leurs enfants sur ce plateau de l’Aubrac à 1 150 m d’altitude, Patricia Sunyer et Laurent Mouliade ont fait preuve de caractère, de persévérance et de professionnalisme. Là où se trouvait encore en 2007 une ferme du XIXe siècle entièrement à restaurer, revit une bâtisse lumineuse où se confondent harmonieusement les lignes contemporaines du mobilier et la sobriété élégante des matériaux.

Patricia et Laurent se sont rencontrés à la fin de leurs études et ont démarré leur vie professionnelle dans le même grand hôtel en Espagne. Nous sommes en 1998. Laurent est diplômé de l’école hôtelière de Saint-Chély-d’Apcher ; Patricia sort de l’université de tourisme de Gérone, sa région d’origine. Ce sont deux infatigables travailleurs dotés d’une curiosité qui les emmène d’Angleterre, (où ils perfectionnent leur anglais), en Californie (où ils expérimentent le management à l’américaine), en passant par la Polynésie française (où ils installent un Relais et Châteaux)… Pendant dix ans, ils travaillent exclusivement dans des hôtels de luxe.

Bienveillance et simplicité

C’est cette empreinte qui marque leur maison d’hôtes et leur façon d’envisager l’accueil. Pour leurs clients, rien n’est « trop ». Rien d’ostentatoire dans leur démarche, il n’y a que de la bienveillance et de la simplicité. « Je me sens hôtelier », dit Laurent, fils d’éleveurs à Laguiole. « Cette maison, c’est un peu notre petit hôtel, renchérit Patricia. Elle nous donne la chance d’exercer notre métier près de nos enfants. » Rien ne les satisfait davantage que de voir se nouer des amitiés autour de leur grande table. « J’ai appris davantage en un an qu’en dix ans de vie professionnelle dans l’hôtellerie, reconnaît Laurent. Cette proximité, cette expérience humaine n’ont pas de prix. »

Ces deux amoureux du « pays » ont à cœur de présenter la viande de l’Aubrac et les produits du terroir. Les touristes disent qu’ils n’en ont jamais entendu autant sur les vaches ! Laurent aurait pu être éleveur s’il n’avait choisi l’hôtellerie… Loin d’être enfermés dans leur magnifique décor, ils s’échappent aux vacances : Canaries, Baléares, l’Irlande bientôt « pour se dépayser un peu ».

Le vers de Blaise Cendrars leur va comme un gant : « Quand on aime, il faut partir. »

En savoir plus sur Patricia et Laurent :

http://www.borie-aubrac.com/

http://www.lozere-tourisme.com/hebergements-lozere.html

©Régis Domergue

Pierrette Agulhon

La Lozerette est idéalement située entre les Gorges du Tarn et le Mont Lozère. Touristes et habitants de la région s’y pressent tant l’hôtel-restaurant a acquis une notoriété de bonne table et d’hôtel de charme. Pierrette Agulhon, qui représente la troisième génération d’hôteliers, y perpétue une tradition familiale de l’accueil.

Ici, tout le monde l’appelle Pierrette. « C’est un peu à l’américaine », dit en souriant la propriétaire de la Lozerette qui évoque son séjour aux Etats-Unis au début de sa carrière. En réalité, cette proximité naturelle, Pierrette Agulhon la revendique comme une marque de famille. Avant elle, dans sa maison natale de Cocurès, sa grand-mère puis ses parents accueillaient simplement le voyageur. D’une fratrie de cinq filles, l’hôtelière est la seule à avoir voulu reprendre l’affaire familiale. L’éveil du goût pour l’hôtellerie qui lui est venu relativement tard, dit-elle, à dix-sept ans.

Depuis 1990, après des études de gestion hôtelière et six ans dans un Relais et Châteaux des Alpes, on comprend qu’il lui a fallu de l’énergie pour agrandir et entretenir la maison, superviser les 20 chambres actuelles et le restaurant. « Je ne sais pas parler de moi », prévient Pierrette Agulhon. Alors c’est en faisant le tour de la maison que se dira son goût pour la vie, sa nature optimiste, son souci du détail, son infatigable dynamisme : « Rien n’est définitif, on peut tout faire avancer, améliorer, remettre en question. Il faut accueillir le sang neuf, c’est important, sinon on se sclérose sans s’en rendre compte. »

« Ce qui est bon chez nous »

Dans la salle de restaurant aux 80 couverts, elle parle des changements à effectuer pour l’accueil des personnes handicapées. Cela s’ajoute aux autres travaux pour l’hiver : un mur à reprendre pour le salon d’extérieur, une fenêtre de toit, et comme Pierrette aime rêver, un SPA peut-être dans le jardin… Son travail, c’est sa vie ; il lui manque peut-être de voyager faute de temps.

La carte du restaurant change trois fois dans la saison. « Je veux valoriser ce qui est bon chez nous d’autant que la clientèle touristique recherche essentiellement des produits locaux ! » Adhérente du réseau Cévennes écotourisme, elle parle de son engagement comme d’une conséquence naturelle de son éducation. Elle se fournit en viande et poisson auprès de producteurs du département, pour élaborer des plats au plus près du goût du terroir. Pas d’épices si c’est injustifié, les herbes locales – genièvre, origan, thym, serpolet – valorisent ses plats. Elle propose 300 références de vins, régionaux pour la plupart, et raconte comment elle a entrepris ses études de sommelière « sur le tas » grâce au concours de Patrick Pagès, co-créateur de l’Union de la sommellerie française en Languedoc-Roussillon.

Le classique de la Lozerette, c’est la charcuterie, les pâtés au genièvre, le jambon à l’os de Nasbinals. L’autre spécialité de la maison, la panade de morue. « Je me souviens de ma grand-mère qui la préparait dans la poêle, dessalée, blanchie, avec de l’ail et du persil… » L’hôtelière est tout sauf nostalgique. Dans le même esprit, elle a horreur de gaspiller de l’énergie pour ce qui n’en vaut pas la peine. « Rationaliser le travail, être efficace et attentionnée dans ses mouvements, avoir l’œil pour jauger d’un seul coup l’attente d’un client. ». Pierrette Agulhon… une dame à la main de fer dans un gant de velours.

En savoir plus sur Pierrette Agulhon :

http://www.lalozerette.com/

http://www.lozere-tourisme.com/restaurants-lozere.html

©Régis Domergue

Christophe Brunel

C’est une histoire comme on en compte encore en Lozère. Une famille dans l’hôtellerie depuis 4 générations et un représentant actif, Christophe Brunel. Ce baroudeur qui imaginait sa vie sur la route est ancré dans son territoire de Margeride Aubrac où il développe le bio et le locavore, invitant les jeunes à s’y installer.

« Partir sac au dos… je ne ferais que ça ! » Après Paris, l’Angleterre, l’Espagne, la Guadeloupe, l’île de Saint-Martin, le Canada et les Etats-Unis, Christophe Brunel s’active… en Margeride Aubrac où il gère avec frère et sœur les hôtels-restaurants du château d’Orfeuillette et Les Portes d’Apcher ; Poz, un espace de restauration sur l’aire de la Lozère ; et le Rocher Blanc, une affaire familiale créée à La Garde en 1904 par leur arrière-grand-père.

Après l’école hôtelière de Saint-Chély-d’Apcher et une expérience en cuisine puis en pâtisserie, Christophe effectue son service militaire à l’Elysée comme garçon de vestibule de François Mitterrand. « J’ai vu l’autre côté de la restauration, l’accueil et le service, et je réalise que c’est ce qui me plaît. » Depuis, il continue à donner la main en salle.

Cet homme passionné de « sports d’adrénaline » telle que la chute libre est un fana de décoration. Il a imaginé les atmosphères du château d’Orfeuillette, celles du Rocher Blanc où il crée des chambres à thème : « Yin ou yang », « D’amour et d’eau fraîche», « Guerre des stars », « Flower power »… Il déborde de projets qui privilégient le partage et la convivialité et envisage de créer au Rocher Blanc« une cuisine ouverte pour favoriser les échanges avec le cuisinier, un gros cantou que l’on allumerait le soir. »

480 références de vin

Le vin est un autre de ses violons d’Ingres : parmi les 480 références qu’il propose, sa plus belle émotion reste « le Terte de Rotebœuf, un bordeaux. » Parler de vin, c’est parler de terroir. Et le voilà qui enfourche son cheval de bataille : la défense des circuits courts, de l’agriculture raisonnée à défaut du bio, de la diversification… « Cela suppose de travailler main dans la main avec les agriculteurs, les producteurs ou les cueilleurs, de garder chez nous les fruits, les herbes sauvages, les champignons que l’on envoie aujourd’hui à Paris ou dans le Sud ! Il faudrait encourager les agriculteurs à élever 6 ou 7 vaches, des poules, des agneaux, pour éviter les intermédiaires… » Il a mis en place « un petit Rungis » avec une multitude de particuliers. La carte du château d’Orfeuillette compte 80 % de produits locaux parmi lesquels 40 % issus de l’agriculture biologique.

Le souci de Christophe Brunel reste d’attirer les jeunes dans une profession où il y a du travail alors que la génération actuelle d’hôteliers restaurateurs « s’arrêtera dans moins de dix ans ». « Dans un des plus beaux départements de France aussi. » Et ce bourlingueur qui ne jure que par les voyages avoue avoir « du bonheur à être chez soi. Il faut partir pour s’en apercevoir. » En janvier, quand même, il s’en ira sac au dos en Thaïlande. « Pas possible de vivre autrement. »

En savoir plus sur Christophe Brunel :

http://www.hotels-brunel.com/fr/modern-art-et-services.php

http://www.lozere-tourisme.com/hebergements-lozere.html

©Régis Domergue

Franck Montialoux

A Sainte-Enimie, dans une maison cachée au cœur du village, Franck Montialoux imagine des bijoux pour lui et pour de grandes maisons de couture. Après une carrière enviée où il réhabilite la tête de mort, et bien qu’il reste présent sur les salons en France et à l’étranger, il revient au pays cueillir le jour.

Franck Montialoux est un pur Lozérien dont les origines de la famille remontent au XIIIe siècle. On sent quelque fierté à retracer brièvement sa généalogie. Lui-même est né en Lozère et y a passé sa scolarité avant de partir étudier à Lyon à l’école de Condé, puis à Paris, à l’IESA ( Institut d’études supérieures des arts) quand il pensait se spécialiser dans la restauration de tableaux.

Après dix-sept ans de vie parisienne, deux marques créées – GWA (Gentleman Woman Accessories) joaillerie, 26 Passage –, l’évidence le rattrape : rien ne vaut la Lozère. « Je rentre », dit-il à qui veut l’entendre. Il relance une création à son nom. Ayant ancré sa réputation dans le milieu de la joaillerie avec ses « têtes de mort », il assume en toute légitimité de signer Franck Montialoux.

A propos des vanités, le créateur est intarissable ! « La vanité a toujours été présente en art, elle ne fait que transmettre le message de profiter de la vie. Carpe diem ! C’est le XXe siècle qui a perverti la tête de mort en la rendant “trash”. Au contraire, son côté épicurien est plutôt sympa. »

Il brandit un crâne, en caresse les rondeurs, les cavités : « C’est très graphique, esthétique et quel bel objet symbolique ! Le cerveau, la connaissance, le savoir, l’intelligence, le tout dans ce magnifique écrin… »

Passionné et impatient…

Devant sa collection de vanités – des bagues essentiellement – en argent, réhaussées de pierres précieuses pour certaines, il s’amuse encore d’avoir « tiré le portrait » du Père Noël, de Henri IV ou de Mozart, de Bob Marley, des Village People, de Charlie Chaplin et de « méchants » tels Terminator ou Hannibal Lecter… A quarante ans, Franck Montialoux est toujours passionné comme au premier jour. Et impatient… « Je veux encore tout tout de suite, et comme j’ai trop d’idées, rien ne va assez vite. Un projet pousse l’autre, c’est sans fin ! ».

S’il réalise encore des bijoux, il préfère aujourd’hui les dessiner, et pour d’autres marques, car s’adapter au style de grandes maisons est un défi sans cesse renouvelé. Cette année encore et pour la troisième fois consécutive, il conçoit la couronne de la future Miss France ! «  C’est une émotion sublime de voir les bijoux que j’ai dessinés portés par quelqu’un.  » La tête en Lozère, les pieds à Paris ou ailleurs, il fréquente toujours les salons à la découverte des dernières nouveautés en joaillerie. Détaché de la vie citadine turbulente, il cultive pourtant ses attaches et ses amitiés, quitte son village pour mieux y revenir. Il y a dix ans, on lui aurait demandé ce qui suffisait à son bonheur, il aurait répondu « voir ma marque exploser et devenir milliardaire ». Aujourd’hui, il lui suffirait juste d’être heureux. « Aller à l’essentiel, c’est cela, non ? »

En savoir plus sur Franck Montialoux :

http://www.franckmontialoux.com/collection.php

©Régis Domergue